Par Agnès Munyua
En février 2019, le SPARC a été invité par le secrétaire de Cabinet du Kenya à apporter son soutien à un groupe d’experts chargé de procéder à un examen qui transformera et repositionnera le Fonds National de l’Assurance Hospitalière (NHIF) en tant qu’acheteur stratégique de services de santé (strategic purchaser of health services). Cette demande a permis au SPARC d’appliquer l’approche de coaching et de mentorat (coaching and mentoring approach) qu’il développe conjointement avec le Collaboratif Africain pour des Solutions de financement de la santé de l’USAID (African Collaborative for Health Financing Solutions) et l’Accélérateur du Renforcement des Systèmes de Santé de l’USAID (Accelerator).
Les processus de changement dans les pays sont complexes et impliquent l’engagement de nombreuses parties prenantes, la gestion de la dynamique politique entre elles et l’obtention de leur adhésion pour initier et soutenir le changement. Lors de la prise de décision critique, un mentor peut être une caisse de résonance utile pour les partenaires nationaux et offrir des conseils stratégiques de haut niveau basés sur des situations similaires auxquelles il a participé. Un mentor est un expert chevronné et respecté, qui a souvent l’expérience de la direction d’institutions et/ou de la gestion du processus de changement.
Au Kenya, Nathaniel Otoo, le directeur exécutif sortant du SPARC, a mis à profit sa vaste expérience de Directeur Général de l’Autorité Nationale de l’Assurance Maladie au Ghana, en tant que mentor pour l’engagement du SPARC dans le groupe d’experts du NHIF (as a mentor for SPARC’s engagement with the NHIF Expert Panel). Vous trouverez ci-dessous quelques réflexions et conseils de Nathaniel, tirés de son expérience en tant que mentor :
- Les processus de changement ne sont pas linéaires : Le processus d’initiation d’un changement au sein du gouvernement est rarement linéaire et se conforme rarement à des plans de travail de projet soigneusement élaborés. Nathaniel recommande de mettre en place des délais pour les engagements des pays, en particulier ceux qui nécessitent des changements complexes entre plusieurs agences, l’engagement des parties prenantes et/ou des changements de législation.
- La légitimité est la clé : Nathaniel a été présenté comme mentor du groupe d’experts par le secrétaire du Cabinet, le champion du processus. Cela a légitimé sa position et lui a permis d’aider les pays partenaires. L’expérience de Nathaniel a également été déterminante dans sa sélection – il avait le bon profil et l’expérience d’un pays au contexte similaire, doté d’un système d’assurance santé très respecté.
- Un mentor doit se trouver à l’arrière-plan et non au premier plan : Nathaniel ne prend pas de décisions, ne donne pas d’opinions ou de conseils non sollicités, et ne choisit pas de solutions pour les partenaires nationaux. Au contraire, il s’est engagé uniquement sur demande, pour fournir des conseils qui conduisent à des solutions locales en vue d’une réforme pour achats stratégiques.
- Soyez flexible, réactif et adaptable: Nathaniel a reçu diverses demandes en tant que mentor, et il a dû prioriser sa disponibilité savoir quand il était temps de faire appel à une expertise supplémentaire.
- Construire un consensus pour parvenir à des solutions : Les processus de réforme des pays sont complexes et il existe souvent des gagnants et des perdants dans tout changement proposé. Nathaniel a souvent servi d’intermédiaire dans les discussions entre les pays partenaires pour parvenir à un consensus et résoudre les conflits. Pour ce faire, il devait être considéré comme un intermédiaire légitime et rester un arbitre neutre et respecté par toutes les parties.
- Utiliser des canaux formels et informels: Nathaniel a été engagé pour soutenir le panel et a assisté à des réunions formelles pour donner des conseils et partager son expérience sur demande. Cependant, des canaux et des engagements informels étaient souvent utilisés pour arbitrer et négocier entre des positions conflictuelles, et pour des séances individuelles afin de discuter des questions confidentielles ou controversées avec les membres du panel.
- Être une source d’information crédible et objective: Il faut savoir tirer parti des principes positifs qui fonctionnent à partir d’exemples internationaux afin de générer des solutions locales, au lieu d’imiter des «modèles» ou des «systèmes» dans leur ensemble, car certains éléments peuvent ne pas fonctionner correctement dans le contexte de ce pays.
- Écouter : Enfin, et c’est le plus important, développer des canaux de communication et mettre en place des points de contrôle avec le champion et les pays partenaires pour solliciter une rétroaction objective. De cette façon, vous pourrez évaluer l’utilité de votre rôle de mentor pour le processus de changement et les partenaires nationaux et vous assurer que vous ne constituez pas un goulot d’étranglement, mais que vous répondez plutôt à leurs besoins et attentes en termes de mentorat.
Ces astuces constituent un point de départ sur lequel le SPARC s’appuiera afin de continuer à tester cette approche de coaching et de mentorat. Êtes-vous d’accord ou pas ? Quelle autre astuce avez-vous tirée de votre expérience ? Nous sommes impatients d’avoir de vos nouvelles et espérons poursuivre cette conversation !
Profil de l’auteure
Agnès Munyua est administratrice en chef de programme chez Résultats pour le Développement, où elle soutient le développement de l’approche de coaching et de mentorat. Elle est également la facilitatrice technique du Partenariat technique du SPARC pour la Cartographie des Progrès d’Achats Stratégiques dans la Santé.